Quand Superman sort du placard, il met sa veste dans les deux sens. Clark Kent et Loïs Lane ont un fils bisexuel. Et alors ? Depuis quand les superhéros ont une sexualité ?
Après la paternité de James Bond, il y a la sexualité de Superman. Ou de son fils, oui, c’est une nouvelle génération et ce n’est pas le personnage d’origine qui est mis sur la sellette. Néanmoins, on remarque gentiment que les codes mutent et que les héros séculaires se voient transformés par l’époque. Au point qu’on en vient à se demander qu’elle est l’orientation sexuelle de chacun d’eux, dont Superman, donc.
Or, depuis quand est-ce qu’on regarde par le trou de la serrure des superhéros ? Est-ce que Superman arrive seulement à retirer sa combinaison de lycra, hein ? Un monde de possibles s’offre alors à notre imagination… Est-ce que la combi passe au sèche -linge ou la lave-t-il religieusement à la main ? Parce qu’on a quand même l’impression qu’il ne la quitte jamais. Et s’il est amoureux, il reste plutôt asexué. Le cœur parle, pas le sexe. Non ? Si. Aussi vrai que James Bond est un mâle alpha, collectionneur de conquêtes et non un papa poule qui risque sa vie pour un doudou.
© DC Comics – John Timms
Pourquoi la nouvelle de l'orientation (bi) sexuelle de Jon Kent, fils de Superman, fait le buzz ?
En définitive, on s’en fiche de la vie sexuelle des héros de BD. Comme on se fiche de ce que fait notre voisine de droite et le caissier du supermarché du quartier. Cette appétence pour les détails d’une chambre à coucher laissent un peu dubitatifs. À condition que les cris soient modérés et qu’ils ne nous empêchent pas de dormir, en quoi les coucheries d’untel ou d’un super-tel nous regardent-elles ?
Si le fils de Superman décide de se mettre en trouple, grand bien lui fasse ! N’est-il pas que question de consentement ? Tant que les adultes concernés choisissent leurs actions en toute connaissance de cause, même en collants, cela ne nous… regarde pas #LesInconnus. Notre première surprise est peut-être que Superman a un fils. Donc une sexualité, point barre. Or, s’il a un fils, il peut avoir un lover, parce que, la sexualité est multiple. CQFD et LGBTQ+.
© Erin Gallagher
Il n’a pas toujours été ambigu sur son orientation sexuelle, Superman ?
Ceci-dit… Superman homosexuel… Est-ce qu’on ne s’en doutait pas un peu de toutes façon ? Les cheveux bien gominé, la tenue aux couleurs flashy, presque brillantes, proche du corps avec de petites bottines, le muscle lustré et les petites lunettes toujours impeccable, il était déjà un peu précieux Superman. Comment ça, c’est cliché ? Les plaques de chocolat ne font pas rêver que les femmes, et de tous temps ça se sait.
Sachant que le nouveau Lucky Luke fait un petit détour par Bareback Mountain accompagné de vaches mauves dans la nouvelle BD hommage à Morris de Ralf König, Choco Boys, la porte est ouverte à toutes les fenêtres en termes de chocolat !
Et on en parle de Batman ? Accompagné de son petit lutin Robin, on peut noter que l’ambiguïté a toujours été là. Depuis, c’est Kathy Kane qui s’y colle ouvertement dans la combinaison d’une Batwoman lesbienne. Car, que ce soit chez DC Comics ou Marvel, la nouvelle génération de superhéros en collants n’hésite pas à mettre sur le tapis les problématiques de l’époque. Urgence climatique, inégalités sociales, migrations et, évidemment, sexualité et identité.
La bande-dessinée comme miroir d’une époque
Tom Taylor aux textes, John Timms au dessin et Galbe Eltaeb à la couleur sont alors dans l’air du temps avec leur SUPERMAN : SON OF KAL-EL, Tome 5. Pour le créateur de ce cinquième opus qui fait polémique, dans lequel Jon Kent, fils de Superman et de Loïs Lane, entame une relation amoureuse avec le journaliste Jay Nakamura, au-delà de son orientation sexuelle, le superhéros est un symbole. D’espoir, de justice et de vérité. Une image à laquelle s’identifier qui doit s’extraire de toutes considérations de genre ou de sexualité. Alors, pourquoi pas bisexuel ? Parce qu’on pourrait aussi se poser la question de la passion immodérée des Messieurs Kent pour les reporters, puisqu’on en parle…
Le dessin sur lequel les deux jeunes hommes s’embrassent sorti sur les réseaux le 11 octobre dernier n’a pas manqué de faire réagir, les fans comme les autres. Ainsi, le républicain Josh Mandel déplore que la bisexualité dans la bande-dessinée pour enfants essaie de détruire l’Amérique. On savait que Superman, l’homme de fer, avait de grands pouvoirs… mais il ne semble pas les utiliser à ces fins-là. D’autres s’y sont attelés avec énergie et détermination.
Si les communautés jusqu’ici stigmatisées et, dans bien des pays (voire des villes ou des quartiers) encore persécutées, sortent de l’ombre et s’affichent comme une forme parmi d’autres de normalité, pourquoi n’auraient-elles pas droit, elles aussi, aux collants en lycra, hein ? À condition, bien évidemment, que nous ne soyons pas toutes et tous et eux et nous, contraints de nous glisser ad vitam aeternam dans une combi fluo shiny. D’ailleurs, est-ce qu’elle se lave en machine finalement ?
SUPERMAN : SON OF KAL-EL #5
À paraître le 16 novembre 2021
Scénario : Tom Taylor
Dessins : John Timms
Couleurs : Galbe Eltaeb