Il n’y a pas de blues, de rock, de flamenco, de folk sans guitare. Sans guitares, même. L’instrument qui, avec le piano peut-être, peut se targuer d’être le plus polyvalent et l’atout majeur d’un grand nombre de styles musicaux. Quoi de plus naturel que de lui consacrer un événement majeur en musique, en savoir-faire et en spectacle ? Rendez-vous au MIGS 2022 !
Pour la toute première fois, la ville de Montreux, bien connue pour son festival de jazz et ses nombreux artistes en visite, célèbres et non moins talentueux, déroule son tapis rouge à la guitare. Uniquement l’instrument, dans tous ses états. Du ukulélé à la basse, de sa première version aux dernières innovations, les créateurs, les luthiers, les amateurs, les curieux et les gratteurs se réunissent sur 3 jours en un même lieu, autour de la dame aux courbes harmonieuses. Mesdames et Messieurs, du 29 avril au 1er mai 2022, soyez au rendez-vous pour célébrer comme il se doit la guitare et ses cousines au premier Montreux International Guitar Show, plus simplement dit MIGS !
Le MIGS, c’est quoi ?
Le Montreux International Guitar Show, c’est avant tout un salon. Avec des exposants du monde entier, venus spécialement pour faire découvrir au public, professionnel, amateur ou tout simplement curieux, leurs dernières créations. Le but est d’en avoir plein les yeux, de pouvoir échanger, dans une ambiance décontractée, de manière exceptionnelle et privilégiée avec des luthiers notamment, méconnus et pourtant virtuoses dans leur art.
Vous vouliez en avoir plein les oreilles ? Pas de panique, bien évidemment, pas de guitare sans cordes ni de cordes sans musique ! Des artistes de premier ordre seront de la partie pour des master classes et des concerts, destinés à tous, dans un écrin intimiste. Il y a de quoi saliver et se réjouir.
Pour en savoir plus sur cet événement extraordinaire qui s’apprête à ouvrir pour la première fois ses portes, nous avons fait appel aux deux co-fondateurs du salon de la guitare de Montreux, plus rock-tastiquement nommé Guitar Show, Emmanuel Cottier et David Rosset, qui nous ont expliqué ce qu’ils avaient en tête et comment tout a pris forme. Une interview intarissable, pleine de passion et de frissons d’excitation à la perspective de rendre cet hommage magistral à la guitare.
L’interview exhaustive et passionnée des instigateurs et fondateurs du Montreux International Guitar Show
Nous commençons toujours par une question rituelle : pourriez-vous chacun vous présenter à votre manière ? Vous avez carte blanche…
Emmanuel Cottier : Bonjour ! Moi c’est Emmanuel Cottier. Ce que je fais dans la vie ? Je travaille dans le monde de la guitare, je suis ce qu’on appelle un guitare-tech : j’entretiens, je répare, je prépare, je modifie, je cherche, je trouve, je vends, je restaure des instruments de musique, mais surtout tout ce qui tourne autour de la guitare, pour des artistes et pour des clients de manière globale. Donc j’achète et je vends des guitares, j’en ai plein partout, et des amplis. Mon métier c’est ça.
Et puis j’ai un passé. J’ai été directeur de ventes chez Hornbach, je suis électronicien de formation et j’ai fait beaucoup d’autres choses encore, avant. Voilà un peu qui je suis.
Emmanuel Cottier
David Rosset : Moi, je suis David Rosset. Je suis issu du monde de la publicité au départ. Depuis une dizaine d’années, j’ai une agence événementielle qui fait beaucoup de choses, qui organise des événements d’entreprise, de la location de matériel, qui travaille avec des centres commerciaux, etc. Je connais Emmanuel depuis une vingtaine d’années parce que je suis guitariste dans un groupe de musique amateur et il me réparait mes amplis. On a aussi fait des choses un peu électroniques ensemble, pour qu’il tente de réaliser mes délires de musicien (Rires).
David Rosset
Quel type de musicien êtes-vous ?
DR : Pas bon. (Rires) Moi, je ne suis de loin pas un guitariste virtuose. Je fais du rock, j’aime beaucoup travailler les harmonies des guitares avec des sons qui se croisent ou ne serait-ce qu’une note qui tient tout le long. Voilà, je ne suis pas du tout un grand technicien, bien que je m’intéresse maintenant à certaines techniques. Mon délire c’est d’être sur scène, de faire de la musique qui donne envie de bouger aux gens. Donc on travaille avec mon groupe pour essayer d’avoir des concerts.
EC : Moi j’ai été un bon musicien, mais avec les claviers. Et puis un jour, j’ai vrillé vers la guitare dont la technique m’a tellement intéressé. Je ne suis sûrement pas un grand guitariste, je suis plutôt devenu quelqu’un qui sert les autres. Donc, je sers la musique des autres. Ma musique, c’est celle-ci.
Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu’est ce Guitar Show qui s’annonce ? A qui s’adresse-t-il ?
DR : Le Guitar Show, c’est un rassemblement. Un premier salon de la guitare dans son ensemble, en Suisse, qui a pour but de mettre en relation des guitaristes professionnels, amateurs ou des gens simplement intéressés par l’instrument avec des artisans, avec des gens qui travaillent les instruments à la main, qui vont chercher le bois, etc. De permettre à ces gens de discuter, de converser, et éventuellement, que les exposants puissent vendre des guitares. Quand je dis « guitare », c’est au sens large. On trouvera des basses et d’autres instruments qui lui ressemblent. Donc c’est un salon, vraiment. Et puis, il y aura des concerts et des master classes pour animer tout ça.
EC : Ce qu’il faut savoir, c’est que pour les luthiers, ces salons représentent des moments où ils peuvent présenter leurs nouvelles créations, de venir avec de nouvelles idées. Et ce sont des sortes de challenges aussi, parce que, pour ceux qui ont un peu d’ambition, ils ne veulent pas revenir chaque année avec les mêmes choses. Il y a une forme d’émulation dans ce genre d’endroit, parce qu’ils se « tirent un peu la bourre » finalement, à vouloir montrer ce qu’ils savent faire.
Ce qui est passionnant, c’est que vous avez forcément des pièces assez incroyables à voir. Il y a autant le petit artisan – on a rempli une demande de visa pour un artisan qui vient d’Algérie par exemple, qui ne fait que quelques guitares par année – et puis on a des marques comme Sauvage Guitars, qui valent quelque chose comme CHF 70’000.- pièce. C’est assez éclectique en fait.
C’est un événement de passionnés mais aussi une curiosité artisanale comme vous pourriez aller le dimanche visiter un château avec une mise-en-scène d’époque et ses artisans. Donc on peut se passionner pour ça, même si on n’est pas des amoureux de la guitare. Il y a tellement de belles choses.
DR : Ce qu’il faut comprendre aussi, c’est qu’ici, en Suisse, on a de super magasins de musique. Mais on n’a que quelques marques. Parce qu’évidemment, c’est un marché, c’est un business et ils ne peuvent pas se permettre d’acheter des marques d’artisans. Alors, ce qu’on veut, ce n’est pas de leur faire concurrence, mais, en complément, de montrer qu’il y a d’autres personnes qui font des guitares, qui font des instruments absolument incroyables. Et ce sont des choses qu’on ne peut pas trouver en magasin, parce que ce n’est pas rentable. Pas vendable, même.
Ce sont vraiment des coups de cœur pour des gens passionnés. Peut-être même pour des gens qui les achèteraient comme ils le feraient d’une œuvre d’art, en se disant : « OK, j’achète cette guitare , je n’en fais pas, mais juste parce que l’objet est magnifique » C’est ce que nous essayons de faire comprendre au public et que nous allons essayer d’amener chaque année avec le Montreux International Guitar Show.
Comment cette idée s’est imposée à vous ? Est-ce qu’elle existe dans vos discussions depuis des années ou est-ce qu’il y a eu un moment clé, une rencontre (peut-être d’un artisan justement) qui vous a décidé à vous lancer dans ce MIGS ?
EC : Ça, c’était surtout pour le côté artistique de l’événement. Pour le côté salon, il se trouve que j’ai fait des salons, j’ai créé des marques que j’ai revendues après, etc. J’ai fait partie des gens qui allaient exposer. Et puis, j’ai fait un salon en Suisse, un tout petit salon qui était plus pour les magasins, avec juste de guitares normales, de marques que tout le monde connaît comme Fender, Gibson… Des vieilles, des neuves, des occasions.
Et je me suis dit : « Il y a des gens qui viennent voir ça, c’est bien, mais il existe tellement d’autres choses ! »
J’ai acheté les premiers bouquins qui ont existé sur la lutherie française, sur la lutherie historique, il y a toute une histoire qui a commencé avant la guerre, toute une évolution de la guitare. Alors je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose en Suisse. J’en ai parlé à quelqu’un qui m’a conseillé de voir des gens qui travaillent dans l’événementiel. David a poussé ma porte, quelques jours après, et je me suis dit :
« Il faut que je lui en parle à lui, puisque je le connaît. »
Lui raconte souvent l’expérience suivante : Il voulait acheter une guitare d’une grande marque, Martin, alors il est allé dans un grand magasin, l’un des seuls qui a quelques marques annexes, parce qu’ils ont les moyens de le faire. Il a alors essayé une guitare d’une autre marque, qui s’appelle Boucher, des canadiens, qui fabriquent leurs instruments de l’arbre à la guitare. C’est-à-dire que la famille Boucher va abattre les arbres, choisir dans les pièces d’épinette, les coupes en quartier, quelle planche elle va prendre pour faire les tables d’harmonie… Donc, vous voyez, c’est un métier qui va au-delà de juste fabriquer un instrument. Et c’est une guitare incroyable ! David l’a essayée, il en est tombé amoureux et il a dépensé deux fois ce qu’il pensait.
DR : Chut…
©Boucher Guitars
EC : Il a complètement percuté le fond de l’idée que j’avais pour la création du salon Guitar Show. Il y a de belles découvertes et de belles rencontres à faire. C’est ce qui m’a motivé et ce qui, je crois, le motive lui aussi.
DR : C’est juste, c’est exactement ça. Je lui ai raconté cette anecdote que je venais de vivre et justement, dans ce magasin on m’avait conseillé d’essayer cet instrument, je ne connaissais pas la marque, ça m’a fait vibrer à l’intérieur. OK. Mais on ne m’a pas parlé du bois, on ne m’a pas expliqué d’où ça venait. C’est clair que si j’avais eu en face de moi la personne qui avait fabriqué la guitare, ça aurait été un échange incroyable. Voilà, ça ne m’a pas empêché de l’acheter, du tout, mais je pense qu’on peut aller plus loin avec ces artisans qui mettent leur cœur dans chaque pièce et qui ont un savoir-faire absolument extraordinaire.
Est-ce que vous espérez déclencher des vocations aussi ?
EC : Bien sûr !
Est-ce que ce sont des métiers qui se perdent ?
EC : Alors, étonnamment pas. Le monde de la guitare se porte plutôt vachement bien. Il y a beaucoup de sociétés qui engagent, il y a des marques qui se sont développées et prennent des stagiaires, des apprentis. Il y a un vrai engouement, une passion, une vraie envie. Ce n’est pas un métier du bois comme cueilleur d’arbre qui disparaît, mais un métier où il y a de plus en plus de jeunes. Il y en a même qui ont fait des écoles d’ingénieurs, qui ne sont pas luthiers, mais qui savent utiliser des machines à commande numérique et se lancent là-dedans en faisant du design. Après, ils engagent un luthier où ils apprennent à faire des choses chez les autres, etc. Je trouve que c’est plutôt un métier qui est vivant, mais il faut continuer de montrer que c’est intéressant.
D’ailleurs, c’est pour ça que nous avons le soutien de la FRECEM qui est une fédération des métiers du bois, ébénistes, menuisiers, parce qu’ils voient leur intérêt à venir communiquer avec nous. Et, à terme, on pourra développer plus de choses à travers ça. On a des projets comme d’aller chercher du bois du Valais qu’on pourrait offrir à des luthiers en leur lançant le challenge de faire une guitare avec ça. Ce qui pourrait servir à la communication d’une Fondation valaisanne qui cherche à développer son bois pérenne. Culturellement, il y a plein de choses à faire ! Qu’on aimerait faire ! Maintenant, pour une première édition c’est difficile de tout mettre en place.
Bien sûr ! Et Montreux, c’était une évidence ?
EC : Oui, parce que j’y suis, c’est là que j’ai ma boutique et que je vis. Et que ça fait vraiment du sens. Parce que, ça m’est arrivé, si vous téléphonez à Doug Kauer qui est un fabricant de guitares américain qui marche très fort en ce moment, et que vous lui dites que vous faites un truc à Montreux, il va dire : « Montreux, ah yes ! » Tout de suite il vient, parce que ça lui parle. Si vous faites un truc à Crissier… (Rires)
DR : Mais on a réfléchi, il y a effectivement d’autres options pour ce Guitar Show ! Il y a Genève, pourquoi pas Zurich malgré la langue et la distance, pour nous en tous cas. Mais c’est vrai, on ne va pas se le cacher, Montreux c’est une marque qui fait vendre, c’est une ville d’événements, la commune nous soutient aussi pour ça. À un moment, c’est évident. Mais il faut savoir qu’Emmanuel avait tout réfléchi. Il avait le nom, le MIGS, le diminutif, moi qui vient un peu de la communication, je me suis dit : c’est bon, c’est parfait, c’est là. Et puis on a les lieux aussi pour le faire, chargés d’histoire, notamment le Casino Barrière.
Pouvez-vous nous parler des grands moments de cette première édition du Montreux International Guitar Show ?
EC : Je pense qu’il y en aura plein, parce qu’on a pensé ça – même si je n’ai pas envie de le qualifier comme ça – un peu comme une « fête » de la guitare. Ça fait un peu fête de la saucisse et je ne trouve pas ça cool (Rires). Ce qu’il faut comprendre c’est que ça va être une occasion pour plein de guitaristes suisses, des fans de guitare, de venir voir des gens, pour certains dont ils ont acheté les guitares, et qu’ils n’ont jamais rencontrés. Déjà pour ces gens-là, c’est cool. Parce que si vous aimez beaucoup le travail de quelqu’un , un écrivain par exemple, et que vous avez l’occasion de lui parler 5 minutes de son livre ou de ce qu’il vous a fait, c’est quand même un moment intéressant. Donc, pour plein de gens, il y aura beaucoup d’émotions, là, au Guitar Show, à vivre. Des trucs de passionnés à partager.
Après, il y a tout ce qu’on a mis en place autour. Le lobby du Casino est un lieu qui va être gratuit dans lequel il va y avoir des showcases. Le soir il y aura des after parties, des musiciens qui viendront jouer toutes sortes de covers et ils pourront transformer ça entre eux, s’additionner en une sorte de jam. Ça risque d’être assez fou parce qu’il y aura beaucoup de musiciens top.
Thibault Cauvin
Et puis, les moments phare…
Je pense, le plus beau, c’est quand même Thibault Cauvin, l’un des plus grands guitaristes de musique classique, en tous cas le plus titré au monde, qui vient faire, non pas un, mais deux concerts. Et deux concerts exclusifs au Guitar Show. Des choses qu’il ne joue pas ou qu’il n’a jamais jouées en Suisse avant. Il vient présenter une sorte de concert-discussion autour de Leo Brower, un très grand compositeur cubain, qui a écrit de toutes petites pièces d’étude qui se jouent en quelques minutes et qui ont toutes une histoire. Thibault l’a rencontré et, à 85 ans, il lui en a spécialement composé 3. Alors il va venir raconter cette rencontre et jouer ces pièces.
Thibault Cauvin
EC : C’est l’occasion d’aller découvrir Thibault Cauvin, de regarder ses vidéos sur YouTube : il est solaire, il a vécu dans des chambres d’hôtel pendant 5 ans, fait 1200 concerts dans 120 pays. Ce n’est pas rien. Il s’est complètement émancipé du milieu de la musique classique pour s’accomplir et faire ce qu’il souhaitait. Et puis, il nous a proposé de faire ce qu’il a appelé « Le Grand Concert » qui est une création. Il va venir le vendredi dans la salle et il va réfléchir avec les ingénieurs du son et de la lumière pour créer quelque chose qu’il n’a jamais fait avant.
Complètement spontané, il se donne 4h pour monter un spectacle et nous le livrer.
Martin Miller
EC : Après, avec tous les autres artistes qui seront là, il y aura des master classes, des rencontres… Martin Miller qui est un YouTubeur qui fait 500 millions de vues, qui va raconter comment il joue, pourquoi il joue. Pour les connaisseurs de guitare, il va y avoir des choses à apprendre (samedi 30 avril à 11h30 – concert à 21h).
John F. Klaver qui va venir aussi faire une master class sur le blues (le vendredi 29 avril à 17h30 pour tous les niveaux).
John F. Klaver
EC : Un moment qui va, pour moi, être grand, culturellement parlant : Gaëdic Chambrier, qui est un breton avec de vraies origines celtes dans la musique qu’il fait.
Ce gars-là, c’est devenu l’archéologue de la guitare.
Il s’est intéressé à l’instrument et a reculé dans les âges jusqu’à la Mésopotamie. Et il a trouvé des plans, parlé avec des historiens, des archéologues pour reconstituer ces guitares-là avec des luthiers. Il va venir nous les présenter pendant 2h et raconter leur histoire. Notamment avec certaines pièces qui ont été réécrites comme à l’époque, avec des harmonies qui ne sont pas toujours agréables à écouter. Histoires de guitares est un spectacle qui a nécessité d’énormes recherches, qui n’a jamais été présenté chez nous et qui va se jouer l’après-midi (le samedi 30 avril à 14h), autant pour les enfants que pour les adultes. Pour l’avoir vu, je peux vous dire que c’est fou. Il est vraiment brillant.
Gaëdic Chambrier
Et comment ça fonctionne concrètement ? Quels sont les programmes en libre accès ?
DR : Alors, les showcases et les after parties qui se déroulent dans le lobby, où il y aura aussi un bar, sont gratuites. En revanche, les master classes et les concerts sont payants (billetterie ICI). On a, je pense, appliqué des prix très corrects, en fonction des artistes et des coûts que nous avions, parce qu’on n’a pas une ambition de festival et de gagner de l’argent grâce aux concerts. Il n’y en a pas un qui va au-delà de CHF 42.-. Par exemple, si on est plus blues, rock, on a Ben Poole qui sera là (samedi 30 avril à 21h), un anglais incroyable qui a fait lui aussi énormément de vues sur YouTube.
Ben Poole
DR : Donc, même des gens qui ne sont pas du tout initiés au monde de la guitare et qui souhaitent passer un petit moment au MIGS peuvent venir en famille, parce que les prix sont accessibles. On n’a pas besoin d’être guitariste pour apprécier, ça va être une fête avant toute chose, notamment pour les concerts du soir.
EC : Et ça va être super intime, parce que c’est une petite salle de 250 places, avec des tapis, c’est feutré, il y a une ambiance. Ben Poole, vous allez le voir dans un festival de blues, il va livrer un set qu’il a travaillé, qu’il connaît, ce n’est pas la même chose qu’après une belle journée à Montreux, sur une petite scène, face à un public restreint. L’énergie n’est pas la même. Et c’est aussi un défi pour les artistes, d’aller chercher ce public-là. Je pense qu’on va avoir la chance de voir des moments qui n’arriveraient pas dans d’autres conditions.
Et quel est l’artiste qui vous fait le plus rêver ? Pas forcément parmi ceux qui vont venir jouer à cette première édition du Guitar Show.
DR : Dans l’absolu, donc. Il y en a énormément, mais j’ai donné une mission à Emmanuel qui est en charge de la recherche d’artistes, c’est d’avoir Slash dans 5 ans. (Rires) Il ira peut-être dans une autre salle que celle du Casino, parce qu’elle ne sera pas suffisante pour rentabiliser ! Mais pour moi, c’est un peu ma génération, j’ai grandi avec ce genre de guitariste et ce genre de musique. Il m’influence beaucoup quand j’essaie de faire des solos.
Slash
EC : Je trouve que c’est une question hyper difficile. Pour moi, tous ceux qu’on a au MIGS, c’est déjà génial. J’ai plein d’idées dans ma tête pour les prochains, et surtout pour réaliser des choses que les autres ne font pas.
Par exemple, si devais avoir un objectif, avec un budget illimité, je ferai venir John Mayer.
Parce que c’est un artiste brillant, il a un niveau de guitare qui est 10 fois supérieur à ce qu’il présente dans ses albums, il serait capable de faire quelque chose qu’il ne ferait pas ailleurs et il n’a jamais mis les pieds chez nous. Il n’y a pas un festival (en Suisse), encore aujourd’hui, qui a signé ce mec-là.
John Mayer
Ça pourrait être cool et passionnant de l’entendre parler de guitare, d’autant qu’il est ultra accessible, dans le sens où il plaît à tout le monde, pas qu’aux fans de guitare. Mais il y en a tellement d’autres… Tellement de guitaristes inspirants, tellement de mecs qui vous mettent les poils. Qui sont géniaux, dans le blues, dans le rock…
Nick Johnston qui vient au Guitar Show (master class dimanche 1er mai à 13h), c’est un gars dont certaines chansons sont folles guitaristiquement parlant : les gammes dans lesquelles il joue, la façon et la facilité avec lesquelles il y parvient. Et on ne s’en rend pas compte. C’est comme un grand maître aux échecs, ce qu’il fait sur un manche. Intellectuellement, c’est de ce niveau-là. Même si vous n’êtes pas fan de guitare, vous percevez qu’il y a quelque chose dans ce qu’il fait, qui est au-delà de ce que vous avez entendu 400 fois à la radio.
Nick Johnston
Ce qui nous différencie complètement d’un festival : ce qui nous intéresse, c’est la guitare.
EC : Jamais ça ne sera terminé, comme recherche. Ce n’est pas comme d’acheter la tournée européenne d’un artiste. Vous voyez ? Qu’est-ce qu’il y a d’incroyable à faire venir Lenny Kravitz ? Quand il part en tournée, il est à vendre et vous payez ou vous ne payez pas. Tout le monde peut faire ça, à condition d’avoir le budget. Mais trouver un mec qui est intéressant du point de vue de la guitare et le motiver à venir faire quelque chose d’inédit, c’est beaucoup plus difficile. Et c’est ce qui est passionnant. Quand David me demande d’avoir Slash, si c’est pour voir ce qu’il fait d’habitude, c’est pas pareil que s’il fait quelque chose de nouveau.
Quand vous commencez à vous intéresser à la guitare, c’est un puit sans fond.
Parce que ça peut être un mec comme The Edge (U2) qui n’a pas forcément une technique incroyable mais a inventé des sons inédits. Il connaît tous les effet, c’est un rat de studio, il a des racks entiers de technologie pour jouer et c’est des fois même son technicien qui doit l’aider tellement il y a de réglages pour chaque chanson, programmés dans son pédalier.
Ou on peut aussi parler du cueilleur d’arbre qui connaît tellement mieux la forêt qu’un bûcheron et qui va trouver un arbre qui n’a jamais vrillé, qui est dans la bonne forêt avec une pousse régulière et tout d’un coup, dire que c’est celui-là qu’il faut abattre. Et puis, avec on fait du bois de lutherie, des tables d’harmonie de violon ou de guitare. Il y a des connaissances dans tous les domaines, ça part dans tous les sens : fabrication, vintage, collection, guitares qui ont appartenues à des artistes… On peut en parler sans fin. C’était obligé d’en faire un événement et de le développer.
MIGS – MONTREUX INTERNATIONAL GUITAR SHOW
Casino Barrière Montreux, Rue du Théâtre 9, 1820 Montreux – Suisse
Photo de Une : ©Kauer Guitars