Le Lido ne veut plus être un vieux lieu de cancan, c’est un cabaret ! La grande ambition du nouveau directeur artistique Jean-Luc Choplin est de rendre la salle mythique aux parisiens. Rebaptisée Lido 2 Paris, elle a ouvert ses portes hier pour un CABARET mis en scène par Robert Carsen. Manque de temps ou manque d’espace, le spectacle n’est pas à la hauteur de ses ambitions malgré la qualité de la célèbre comédie musicale.
Hier soir, parterre de stars dans le public pour la première du Lido 2 Paris après son rachat par le groupe Accor sous la direction artistique de Jean-Luc Choplin. Au programme, la célèbre comédie musicale CABARET, dans la version originale en anglais du Musical de 1966. Willkommen, Bienvenue, Welcome… mais deux mois de répétitions n’auront pas suffi. La mise-en-scène de Robert Carsen se perd entre partis pris et amalgames grossiers quand le casting enchaine les fausses notes dans une absence regrettable d’émotion. Dommage.
Première maladroite pour Jean-Luc Choplin
Producteur, directeur du Théâtre du Châtelet puis de Marigny, figure incontournable de la scène parisienne depuis presque deux décennies, Jean-Luc Choplin a repris les rênes du Lido, bien décidé à redonner vie au cabaret théâtre, où se mêlent avec virtuosité danse, chant et scénographie féérique. C’est alors très justement qu’il programme l’emblématique comédie musicale CABARET pour l’ouverture des portes du Lido 2 Paris.
CABARET
Cabaret, c’est l’histoire de Clifford Bradshaw, un jeune écrivain américain qui, au cours d’un voyage à Berlin au début des années 30, tombe amoureux de Sally Bowles. Meneuse de revue au Kit Kat Klub, cette dernière essaie de faire oublier aux spectateurs les temps troublés qui s’annoncent, mais rêve de devenir une star. Rapidement, Clifford et Sally verront leurs convictions, leurs désirs et le contexte politique mettre à mal leur histoire d’amour.
Et on ne pouvait que s’en réjouir, au vu de l’affiche. Un Sam Buttery en fourreau noir, black eyes et Dr Martens, la boule à zéro en plantureuse Emcee, maîtresse de cérémonie, ça fait rêver. On pouvait imaginer, entre le sujet de la comédie musicale (des personnages qui rallient des camps opposés sur fond de montée du nazisme qui résonne plus que fortement aujourd’hui) et le talent des protagonistes, une fresque subversive, profitant du climat actuel pour tirer des parallèles, ouvertement ou subtilement critiques.
La partition impeccable aurait pu (du ?) être le terreau d’une mise en scène réflexive et intelligente. Elle laisse malheureusement place à des raccourcis absurdes pour le fond, et à des chorégraphies « entassées » et répétitives dans des décors minimalistes et une faible sonorisation, pour la forme.
Sans fil conducteur, ni contexte réfléchi, les plumes et paillettes sont parties sur la pointe des pieds, laissant place à une ère du « glitter rock » qui ne sait pas bien quel est son message. La sensualité s’est enfuie, elle aussi, pour un magma dé-genré et finalement dé-rangeant.
Le Lido 2 Paris sera toujours le Lido
Or, à n’en pas douter, la magie du lieu restera. Les costumes et les lumières étaient hier au rendez-vous et ne manqueront pas d’éblouir, encore et toujours, les spectateurs de demain. Il en faut bien plus qu’une première marche manquée pour reléguer ce haut lieu des nuits parisiennes aux oubliettes.
L’héritage demeure dans le velours rouge habillé de cristaux et les fantômes (bienveillants, cela va sans dire) qui habitent la mythique salle de spectacle continueront de faire rêver, en musique, danse, strass et paillettes.
CABARET au Lido 2 Paris
116 bis Champs Élysées
Mise en scène de Robert Carsen, direction artistique de Jean-Luc Choplin
Avec Lizzy Connolly, Sam Buttery, Olivier Dench, Sally Ann Triplett, Gary Owens, Ciarán Owens, Charlie Martin
Jusqu’au 3 février 2023
©Julien Benhamou