Ski freestyle, slopestyle, big air, snow park, world cup… ça fait tant de nouveaux mots à ajouter à son vocabulaire! Quand Luana voit pour la première fois celui qui partagera sa vie, elle ne se doute pas une seconde de l’athlète qui se tient en face d’elle. Elle nous partage avec tendresse le fin mot de son histoire.
J’ai toujours été de nature inquiète. Les sensations fortes, très peu pour moi ! Les sports à risque, encore moins ! Prenez le grand-huit, par exemple : Que se passerait-il si la machine lâchait ? Si par malheur, ce jour-là, le technicien n’avait pas été attentif à un problème sur le manège ? Ou s’il y avait tout simplement une coupure d’électricité ? Quand j’y réfléchis un peu trop, tous les scénarios possibles et imaginables où les choses tournent mal se bousculent dans ma tête.
Imaginez quelle aurait été ma réaction si on m’avait dit, il y a quelques mois encore, que je partagerais un jour ma vie avec quelqu’un dont les pirouettes et les acrobaties à des hauteurs vertigineuses sont la passion. Je ne m’étais jamais imaginée prendre goût au risque. Et pourtant… Au-delà du sport à risque, cette rencontre m’a fait découvrir une nouvelle partie de moi, inattendue et palpitante.
« Lorsque l’amour se mélange à l’inconnu, l’excitation balaie la peur. »
J’ai tout de suite compris que cette relation allait repousser les limites de mes peurs, de mes appréhensions. Je savais que les premières compétitions ne seraient pas faciles à regarder, que les chutes me feraient inévitablement, chaque fois, le même effet désagréable au fond de la poitrine. Mais contrairement à mes a priori, cela ne m’a pas effrayée. Quelque chose dans cette prise de risque, cette adrénaline contagieuse, m’a fascinée. À tel point que ma peur est passée au second plan. J’ai, dès lors, sans réellement m’en rendre compte, pris un aller simple pour le plus merveilleux tour de manège de ma vie.
Regarde, je vole !
Quand, depuis toute petite, on apprend à éviter le danger, il est dur de comprendre que certaines personnes puissent volontairement aller à sa rencontre. En découvrant le monde du ski freestyle et ses figures acrobatiques à plusieurs mètres du sol, je me suis d’abord demandée ce que les athlètes pouvaient tirer comme plaisir à frôler la catastrophe à chacun de leurs sauts. D’où pouvait provenir cette envie de repousser sans cesse ses limites ? Cette force dangereuse qui incite à aller continuellement au-delà de ses peurs ? Il était dur pour moi d’y voir autre chose qu’un amour malsain pour une fâcheuse tendance à jouer avec le feu.
Et puis j’ai vécu ma première compétition. J’ai regardé, le ventre noué, celui que j’aime s’élancer dans les airs avec la précision d’un équilibriste. Je l’ai admiré se détacher de la gravité, pendant un court instant, pour tourbillonner comme le fait une feuille en automne. Puis, la seconde qui suit, je l’ai vu se poser tout en douceur sur la neige, comme si la prouesse de ce qu’il venait d’accomplir ne demandait aucun effort.
« Je l’admire et je l’envie parce que l’espace d’un instant il connait la sensation qu’éprouve un oiseau en survolant la montagne. Je n’imagine pas plus grand sentiment de liberté que celui-là. »
Alors j’ai vu un sourire satisfait illuminer son visage, mes mains moites se sont desserrées l’une de l’autre sur ma poitrine battante. Le souffle que je retenais jusque-là, a été expulsé de mes poumons en une délicieuse sensation de victoire. Ce jour-là, j’ai compris ce que le danger avait d’addictif: le contrôle et l’adrénaline… J’avais vécu, les deux pieds sur terre, mon premier envol.
Sports à risque : Préparez-vous à l’atterri…crash
Comme la confiance est la clé de toutes relations, celle que porte l’athlète à son corps ne fait pas exception. Il lui fait confiance et moi aussi. Mais parfois ça ne suffit pas. À ski comme dans tous les domaines de la vie, une chute, ça fait mal. D’autant plus mal que l’impact est violent. Et quand il suffit d’un millimètre pour troubler un équilibre minutieusement étudié, les chutes ne sont pas rares. Elles n’en restent pas moins douloureuses à regarder.
Quand je vois la compétition en direct, je ne peux logiquement pas savoir à l’avance quand une chute surviendra. Si ça arrive, j’y assiste, impuissante, le souffle court. Me viennent alors les pires scénarios : des blessures, graves, dramatiques, irréversibles. Je sais pourtant que l’entraînement inclut un apprentissage de la chute. Or, la théorie n’efface pas la dure réalité de la pratique.
"Je ne m’habituerai jamais aux quelques secondes de flottement qu’il lui faut en général pour se relever."
Même en différé, donc en ayant connaissance de qu’il s’est passé, j’ai du mal à le regarder tomber. Je me cache les yeux avant le moment fatidique ou je le passe en accéléré. Après tout, comment regarder un ange perdre ses ailes sans détourner le regard ?
Un peu d’amour avant le prochain tour ?
La préparation mentale fait partie intégrale de l’entraînement d’un sport à risque. Sans ça, le physique, aussi entrainé soit-il, ne suffit pas. Au début, j’avais peur de ne pas réussir à trouver ma place dans tout ça. Mais j’ai vite compris qu’un simple soutien moral, un état d’esprit positif aidaient déjà beaucoup à la réussite. Un moteur créé à base d’amour et de bonnes énergies, plutôt pas mal non ? Je me sens privilégiée aujourd’hui de faire partie, à mon tout petit niveau, de ce rêve éveillé qu’il vit chaque hiver. J’admire son courage, son investissement et sa rigueur. Parce que oui, arriver à voler sans filet de sécurité, ça demande du travail. J’ai peur pour lui mais je me réjouis de le voir s’épanouir dans ce qu’il fait.
Au-delà du prestige de faire des choses exceptionnelles pour le commun des mortels, c’est son amour pour son sport qui m’impressionne le plus. Comme dans tous les sports, à risque de surcroît, le haut niveau demande des sacrifices. Le ski freestyle malgré ses airs de discipline décontractée n’y coupe pas. Quand on fait de sa passion son métier, il est parfois dur de s’y retrouver, entre ses envies et la discipline à avoir pour arriver à des résultats. Sa volonté m’inspire, elle me pousse à croire en ce que j’aime faire.
« La pression qu’il se met est énorme. Malgré ça, les seules choses dont il parle continuellement contribuent à son idée de devenir meilleur. Et surtout, son envie de préserver le plaisir qu’il y prend. Encore et toujours. »
Il tombe, il se relève, il recommence, il s’améliore… comme tout un chacun qui poursuit son chemin dans la vie finalement. À la seule différence qu’il a décidé d’en faire son métier. Son corps me rappelle au travers de ses lignes et de ses cicatrices l’histoire du petit garçon effronté et doué qu’il était et qui, à force de s’accrocher encore et encore à ce qui le faisait vibrer, est devenu l’athlète inspirant qu’il est aujourd’hui.
Il croit en ses rêves. J’y crois moi aussi. Sa foi en la vie et son amour pour son sport ne lui feront pas défaut, je l’espère de tout mon coeur. C’est sur ces paroles remplies d’amour et d’espoir que je vous délivre le fin mot de mon histoire.