Est-ce qu’on va finir par en parler quand même ? Est-ce qu’on va pouvoir un peu sortir ce qu’on a sur le coeur –dans l’estomac, c’est déjà fait pour certains– une bonne fois pour toutes ? Parce que c’est bien joli, hein, vous y êtes allés combien de fois, vous, à l’Arena depuis son ouverture (oui, nous ne sommes plus de jeunes et fraîches gazelles, et alors !) ? Avez-vous eu beau vous répéter que “c’est quand même la cata cette salle” vous y retournez quand même ? Il est temps de dire zut, non ?
Jour J. Arena 10e, ou 28e, on ne sait plus, clap. 19h du soir, j’ai des frissons. Oui, des frissons parce qu’il fait froid depuis le parking P1058 où l’espèce de type de la sécu nous a envoyées… alors que d’autres entrent sans souci dans le tout premier tout proche. On ne devait pas avoir le badge spécial. Ou trop obéissantes, les JJ. Ça doit être ça.
Un p’tit vestiaire ? Pas possible, trop de monde, pas assez vite. Un p’tit selfie, genre “trop heureuses d’être là on va voir des artistes qu’on aime big up big up” ? Mais t’as vu la tronche du lieu Josiane ? Nos parents vont appeler immédiatement les secours croyant que nous avons été enlevées et séquestrées dans une cave sombre, humide et sale. Non, pas de selfie (ce qui n’est pas un mal en soi, c’est une habitude insupportable 😉 ). Un p’tit verre ? Non, en fait, il y a des grands verres de bière éventée et de vieux coca chaud, tu veux ?
N’osez pas dire qu’on exagère, ce n’est pas vrai (ou si peu). D’accord, on retrouve cette problématique dans beaucoup d’autres salles de concert. Éventuellement. Peut-être. Qu’en est-il du spectacle alors ? C’est quand même pour ça qu’on est là. Nous avons rarement eu l’occasion (enfin si, 10 ou 28 fois, on ne sait plus) d’expérimenter avec autant de précision le concept contradictoire de proximité. Nous ne parlons pas du public, là c’est évident que l’empirisme de la question nous est très pénible, mais des artistes sur scène. L’Arena, ce n’est pas grand. C’est une petite salle dans le catalogue de la catégorie des salles-hangars-grises-parterres-gradins-bières-éventées. Et pourtant, vous compterez le nombre d’endroits d’où vous ne voyez rien et, pire, n’entendez rien dans cette boîte de sardines ! Quand nous parlons de ne rien entendre… si… on entend bien quelque chose, disons, une bouillasse de basses qui grésillent, un vague remugle de micro, ah, si, là, une note. Et puis c’est tout.
Notre dernière opération sur place, c’était pour le concert d’IAM. Sans faire aucun jugement de valeur sur la performance scénique d’Akhenaton, Shurik’n et comparses, il nous était impossible de reconnaître la moindre mélodie depuis le côté droit de la scène (à droite, presque tout devant, bref, pas loin). Rien. En nous éloignant un peu pour peut-être capter quelque chose (oui, à l’Arena il s’y produit de la musique Salt, on n’est jamais sûr de capter quelque chose), nous avons été reprises à l’ordre. Nous avions mordu la ligne, comme au saut en longueur. Une ligne blanche par terre, et puis Gandalf : “You shall not pass !”.
Ok “Monsieur j’aime les règles et la loi des bornes qu’on ne dépasse pas”, vous tombez bien. Malgré les innombrables panneaux d’interdiction, vous pourriez nous expliquer ce que fait absolument partout ici, dans ce lieu clos, surveillé, sécurisé, dans le pays de l’ordre et de la propreté, cette fumée qui pique les yeux et nous obligera en rentrant à passer par la case lessive-aération-ventolin-douche-lavage-shampooing-sèche-cheveux ? Oui, nous n’avons que ça à faire, un brushing à minuit, sinon on s’ennuie dans la vie vous comprenez. Mais en même temps, on ne les blâme pas tous ces gens qui s’en grillent une petite (ou vingt) en toute décontraction. Quand la salle ressemble à Artamis (en bien bien pire), on se comporte comme à Artamis (pour les jeunes, voici un lien, pour les anciens, c’était bien, hein…). Y a juste le tarif qui change. Entre autres.
Nous ne sommes pas des ayatollahs de la clope, non, ni de la bière chaude éventée, ni du mauvais son, ni du ticket super cher pour se retrouver bloqué dans un couloir duquel il est impossible d’apercevoir la scène, ni du parking glauque à 3 kilomètres, ni du vomis (on a bien le droit de boire et d’en faire profiter tous les gens autour de nous, que diable), mais quand même, tout à la fois c’est pas un peu beaucoup ? Ou c’est l’âge…
Vous nous direz : “Ouiiiiiii mais l’Arena c’est pas fait pour les concerts de gros son, il faut y aller pour Julien Clerc.” D’accord. Mais pour Julien, vous ne voudriez profiter de la musique sans remugles de cendrier et de bile ? Et puis pour les autres, on va où ? Parce qu’il existe bien des salles à l’acoustique remarquable mais elles sont trop petites. Aussi, on aimerait bien ne pas avoir à aller à Paris, Marseille, Zurich, Berne ou Caluire-et-Cuire pour voir des concerts d’envergure (les artistes sont conscients du fiasco, la preuve, ils préfèrent aller à Winterthur).
Eh Genève ? On rase tout et on recommence ? Ou il va falloir qu’on se convertisse à Michel Sardou ma pov’ Josette.
