Vous nous trouveriez le point commun entre les frères Coen, la route des Jeunes, le Caravage, Bali et Bruce Willis ? Entre l’École Moser et la photographie ? Un animal empaillé et une collerette hollandaise ? Un visage creusé par les rides et un jolie styliste venue de l’Est ? Un dessin animé et un atelier des bricolos ? Un réflecteur et un flash ? Un masque tribal et un rouleau de papier toilette ? Le kung-fu et le jet d’eau ?
C’est confus ? Si vous avez déjà un jour rencontré Georges Altman, vous saurez que tous ces éléments forment le puzzle de sa vie. Chaque pièce est essentielle, chaque pièce soutient l’autre, chaque pièce forme un tout sacrément sympathique et attachant.
C’est l’histoire d’un créateur de films d’animation pressé, d’un graphiste par défaut, d’un peintre en devenir. C’est l’histoire d’un photographe. L’instantanéité du cliché lui plaît, le travail pictural qu’il peut apporter lui permet de concilier toutes ses passions. Il fait de photographie sur commande, certes, mais pas question de tomber dans le kitsch ou le cucul. La praline, c’est pas pour lui. Des fonds noirs qui mettent les volumes en valeur, du sombre qui raconte une histoire, une mise en scène, des masques, des accessoires faits maison, un canard empaillé. Dans son studio, Georges Altman est un créateur d’univers, quels que soient ses modèles : les élèves de son cours de dessin à l’École Moser, un bébé tout neuf, un homme politique, un couple, un groupe. Il capte la spontanéité, le naturel dans un clair-obscur expressif. Il se sert aussi de cette activité, de ses cours de dessin aussi, comme médiateur de valeurs. Touché par les problématiques de discrimination, de racisme, il profite de l’immédiateté, de l’horizontalité de son enseignement, peu bridé par les carcans des programmes scolaires, pour éveiller les jeunes consciences et les sensibilités. Bénévole depuis longtemps à l’association Païdos, il s’engage avec ses moyens et son savoir.
La photographie est le résultat d’une équation. Georges Altman (oui, nous répétons un peu ce nom qui sonne fort et grand !) aime le dessin et la science, la créativité et les réglages, modeler et calculer, les courbes et les droites. (On vous l’a dit, sa vie est un puzzle.) En plus, il garde le contrôle de ses envies et du résultat, le sujet lui confie son image, il dirige, donne le rythme de la séance puis, prend ses pinceaux, fait ressortir un volume, ajoute du contraste, de la profondeur, parfait le scénario.
Il s’amuse et ça se sent. Pourquoi se prendre au sérieux ? L’irrévérence, l’humour et l’absurde rendent la vie tellement plus intéressante. Ses modèles, bien que commanditaires la plupart du temps, sont ses cobayes pour tenter de nouvelles situations. Enfants qui se travestissent et deviennent parents, photo d’entreprise posée comme pour un magazine, un A NI Mal sauvage qui dresse l’objectif ou juste un homme, seul, arrêté dans un geste. Le portrait d’un mentor, Jesse R. Glover, premier élève de Bruce Lee, immortalisé par un padawan admiratif.
Georges aime l’expressivité, les contrastes marqués, les creux, les bosses, les gueules,les grimaces. Il part à la recherche de visages qui racontent une histoire et se désespère quand on lui demande de gommer des traits, de lisser, ce qui revient à effacer la personnalité de son modèle. Il monte alors un projet pour figer les frimousses avec des matériaux divers qu’il applique comme des bandelettes sur une momie. Mais là, surprise, le papier se plisse, se froisse et chiffonne les portraits, la peau s’exprime à travers l’artifice. Avec sa compagne, Marija, il expérimente et fait parler la chair.
Des faces, des bouches et des sourcils. Mais aussi des lignes, des murs et du brouillard. L’architecture et les formes qui nous entourent fascinent également le photographe genevois qui met de temps en temps le nez hors de son studio. Une arête qui perce la brume et le cliché est dans la boîte. Des décors cinématographiques, une atmosphère de polar, des tunnels berlinois.
Vous voyez Bruce Willis courir tout là-bas au fond, poursuivi par un métro en furie privé de ses freins, un Alan Rickman machiavélique et magnifique à ses trousses ? Non ? Vous n’y mettez vraiment pas du vôtre…
Studio Altman
Route des Jeunes 13, 1227 Carouge
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