Le summum de tous les mots vides de sens (malheureusement) et pourtant totalement dans l’air du temps, c’est aujourd’hui : Journée de la tolérance, de la bienveillance, de la patience. Le 16 novembre, c’est la journée où on s’aime et on s’accepte. La tolérance, qui rime avec silence. En fait, c’est la journée où on se tait !
Les plus tolérants du monde doivent être les moines trappistes. Non pas parce qu’ils dédient leur spiritualité et leur vie à Dieu, non. Parce qu’ils ont fait vœu de silence. Ils se taisent. Donc il ne disent pas de mal de leurs congénères, ils les supportent… en silence. À leur image, aujourd’hui (mais aujourd’hui seulement, sinon c’est trop long ou sinon on est Céline Dion), faisons retentir le silence, pour se détester tous autant que nous sommes dans la plus parfaite harmonie. Enveloppez-vous de patience, ajoutez un petit sourire crispé et vous êtes couronné.e reine ou roi de cette belle journée de la tolérance.
Qu’est-ce que c’est que cette journée de la tolérance, hein ?
Journée internationale de la tolérance… ou du Xanax. Calme, douceur et zénitude. Les bonnes résolutions du Nouvel An font piètre mine face à tout ce que vous endurez pendant 24h. Oui, on tolère aussi son conjoint qui ronfle, ses enfants qui cauchemardent, le chien qui a besoin de faire pipi à 5h du mat et le chat qui griffe les portes pour se faire remarquer au milieu de la nuit.
Une journée, de la tolérance ou de tout autre chose, c’est 24h pleines, entières, non escamotables.
Voici donc nos quelques commandements dégoulinants de bienveillance et de philosophie positive et optimiste pour aujourd’hui. Mielleux.
Mon premier mot de la journée à ma fille, avant « Bonjour », ne sera pas : « Retourne tout de suite dans ta chambre pour te changer ! ». Si elle veut expérimenter le patchwork de couleurs, laissons, tolérons…
Je ne râlerai pas contre les cyclistes, même si… (le plus dur, si on en croit notre précédent billet d’humeur à ce sujet)
Mon regard noir et dur n’atteindra pas les parents de cet enfant qui hurle et crache toute son assiette autour de lui pendant mon déjeuner au restaurant (Vous comprenez, il a le droit d’avoir des émotions et de les exprimer pour que la Terre entière le sache.)
Encore sur la route (décidément), je ne trépignerai pas contre les petits vieux qui ne savent pas où ils vont (ou savent, mais font du tourisme)
Le devis demandé il y a six mois n’est toujours pas prêt ? Mais ce n’est pas grave, prenez votre temps mon brave !
Faisons aussi preuve de tolérance envers ces mouches, coccinelles voraces, punaises malodorantes qui se précipitent dans les recoins chaleureux de nos maisons. Les pauvres, il fait froid dehors…
Ton frère a arraché tous les cheveux de ta Barbie préférée ? Respire, regarde comme tu l’aimes, ton frère, accepte. C’est aussi ça l’éducation. Tu es contente ma chérie ?
Fais preuve de tolérance pour que vive mon irrespect
Tiens, tiens. La tolérance demande un effort, une adaptation. Une éducation ?! Faire un pas vers l’autre pour l’accepter dans sa différence, une action qui semble en effet être l’apanage des uns, inversement proportionnel au respect des autres. Le paradoxe de la tolérance pour ceux qui en font preuve et se sentent forcément floué, quelque part.
Mais baste, aujourd’hui, oui, je tolère… mais est-ce que j’accepte ? Pas sûr ! Journée de la bienveillance pour être dans l’air du temps et dans les mots vides de sens, pour le bien vivre ensemble et faire société.
Si ce n’est qu’il s’agit de la tolérance du tolérant, de la bienveillance du citoyen relativement ouvert d’esprit, de l’eau dans le vin du catho-gaucho un peu tendu par ses congénères mais qui, dans le fond, aime les gens, quelles que soient leurs distinctions. Il s’agit finalement d’indulgence, quand la tolérance, la vraie, consiste à l’acceptation pleine et entière de ce qui est différent.
©Mix&Remix
« La tolérance est une vertu qui rend la paix possible. »
Les journées internationales des causes perdues
Faut-il vraiment qu’on nous organise une journée officielle ? Ou est-ce juste parce que, comme toutes les causes perdues, il faut une date pour s’en souvenir… et espérer ?
Quand une partie des habitants de cette planète plonge dans l’obscurantisme, que d’autres soutiennent la candidature d’un nouveau/vieux candidat Trump, pendant que les derniers boivent comme du petit lait les paroles d’un Cyril Hanouna à l’audimat diaboliquement haut, on n’est pas prêt de faire humanité unie. De se tolérer les uns les autres.
Il serait temps que les connards deviennent une cause perdue, une espèce en voie de disparition… qu’on leur créent leur journée mondiale. Qui bizarrement aura lieu le 16 novembre, journée de la tolérance. Qu’ils s’en souviennent un peu.